Distribution
Auteur : Mateï Visniec
Metteur en scène : Victor Quezada-Perez
L'histoire, selon le metteur en scène
Trois clowns, partenaires d'autrefois, se retrouvent dans une salle d'attente pour passer une audition. Ils sont vieux, dépassés, et attendent désespérément que l'on vienne les chercher pour cette audition de la dernière chance.
Après la joie des retrouvailles naît l'angoisse de la compétition. Nicollo, Filippo et Peppino se confrontent et luttent pour un boulot incertain. Chacun, persuadé de son talent, tente d'imposer sa supériorité supposée à ses amis.
Tout est bon pour les trois clowns passés de mode pour essayer d'intimider les autres : menaces, hypocrisie, flatterie, trahison, mensonges.
Ils se réfugient dans leurs souvenirs pour pallier l'angoisse de leur situation actuelle en revivant des numéros passés. Ils tentent de se persuader qu'ils étaient les meilleurs. Cette nostalgie leur permet de voiler la réalité : ils ne sont plus d'actualité.
Leur amitié ne parviendra pas à outrepasser leur soif de reconnaissance et le désir d'être aimé. La surenchère des trois clowns pour prouver leur supériorité respective se terminera tragiquement.
Les trois clowns seront à la fois drôles, féroces, naïfs et plongés dans une absurdité aux accents beckettiens : absurdité de la situation, mais aussi dans le langage même, permettant de combler l'angoisse, le vide, la peur du temps qui s'écoule, sans aucune issue possible.
La note du metteur en scène
J'ai tout de suite été interpellée par ce texte. Le personnage du clown m'a toujours questionnée dans son rapport avec le tragique. Dans une atmosphère qui relève tant de l'univers beckettien que des ambiances bon enfant d'un cirque suranné, j'y retrouve les univers poétiques qui ont fait rêver les peintres, les poètes des siècles précédents, artistes admirateurs. Ils avaient fait du clown un être profondément métaphysique par sa capacité à avoir les pieds sur terre et la tête dans les étoiles. Terrestre, certes, le clown l'est, tout préoccupé par son casse croûte et son devenir immédiat, mais par sa lutte naïve, dérisoire et sans issue contre le « fatum » : il devient une métaphore de la condition humaine.
Ici, la pièce met en scène des personnages de clown joués par des acteurs : le clown en coulisse en quelque sorte, le clown à la recherche d'un emploi de clown. Dans le contexte actuel, avec la précarisation du régime de l'intermittence, avec l'orientation mercantile de la culture, il me paraît bienvenu de montrer, de faire entendre et voir ce texte qui prend tout à coup des accents politiques. Oui, il est nécessaire de parler du statut du comédien, du clown, de l'histrion, dans cette société.